Résumé
Organiser nos ateliers dans l’école de Jibjibe, isolée dans les hauts plateaux Himalayens, ce projet nous semblait surréaliste mais s’est révélé finalement d’une extrême simplicité. L’entrée en contact avec l’école a été en tout point semblable avec celle de l’école de Katmandou, à savoir très opaque à notre entendement.
Après quelques messages échangés avec Gagan (l’ami népalais d’une amie allemande !) puis une entrevue de quelques minutes et un coup de fil d’une trentaine de secondes, les choses semblent avoir été actées. Nous sommes attendus à l’école les 17 et 18 octobre, un enseignant d’anglais sera notre interprète et nous serons logés dans une famille locale…voilà !
Nous qui aimons préparer en amont les ateliers avec les enseignants, obtenir les autorisations concernant le droit à l’image ou encore faire le point sur le matériel dans les classes, nous nous sentons un peu désarçonnés.
Et finalement, tout se déroule parfaitement ! Nous appelons le numéro donné par Gagan sans trop savoir qui est au bout du fil. Entre l’anglais avec accent népalais et la ligne téléphonique de mauvaise qualité, nous comprenons au moins le nom d’un arrêt de bus. Le lendemain, après 4 heures de bus pour rejoindre le village de Kalikashtan, nous marchons un kilomètre avec nos valises sur la tête, puis un groupe d’enfants nous conduit jusqu’à la maison de Gunaraj, le professeur d’anglais et d’informatique et sera notre interprète. D’ailleurs, il nous propose de rester chez lui, offre que nous accepterons. Ses enfants nous conduisent à la balançoire construite pour Dashain, la grande fête hindoue. Ses voisins nous montrent comment couper l’herbe à la serpe. Sa femme cuisine le dîner, simple mais délicieux, on est accueillis comme des rois.
Le lendemain, il nous faudra 2 heures pour arriver à l’école entre marche et moto !
L’école Shree Gusaikunda de Jibjibe est un bâtiment en L sur 2 étages, et enseigne du primaire au collège. Les classes comptent une quarantaine d’élèves mais le directeur tenant à nous offrir les meilleures conditions, nous a réunis 20 élèves (10 garçons, 10 filles) dans le laboratoire de sciences pour nos ateliers.
4 choses nous ont surprises :
- Les filles, s’installent d’un côté de la salle, les garçons de l’autre. Cette pratique est encouragée par le corps enseignant.
- Les élèves demandent la permission pour entrer, et laissent leurs chaussures à l’extérieur de cette salle remplie de produits chimiques.
- On fond de la salle, 3 armoires sont remplies de matériel scientifique : oscilloscopes, produits chimiques, erlenmeyers, multimètres, maquette de système solaire, … tous sont encore dans leur emballage.
- Dans la cour, un bâtiment est en construction, le chantier n’est pas délimité, les ouvriers travaillent pendant la récréation et il faut passer sous l’échafaudage en bambou pour rentrer dans l’école.
Nous avons affaire à des élèves disciplinés et attentifs, malgré un niveau d’anglais faible pour la plupart. Nous sommes surpris de voir que les élèves ont peu d’idées pour décrire leur environnement, alors que la veille, les enfants du village nous avait nommé et désigné un grands nombres de plantes, racines comestibles, arbres fruitiers, …
De façon peu surprenante, les connaissances en géographie sont très limitées. Peu de familles ont la télévision, les élèves ne sortent que très rarement de leur village, et ont peu de repères, autres que ceux de leurs environs immédiats. Néanmoins, les ateliers stimuleront leur curiosité et nous serons heureux de constater qu’ils comprennent et retiennent les concepts principaux.
Comme dans toutes les classes visitées depuis le début du projet, les élèves savent que les arbres produisent de l’oxygène. Ils ont également une vague idée qu’il ne faut pas jeter ses déchets par terre, sans toutefois comprendre les conséquences et identifier le plastique comme un danger.
Vous pensez que les enfants de ce village sont très loin de l’idée de protection de l’environnement, des écosystèmes et de la biodiversité ? Bien au contraire. Chaque famille vit ici pratiquement en autarcie. Chaque foyer possède un petit bout de terrain pour cultiver du riz, des courges, du millet, des arbres fruitiers, pour sa propre consommation. Une vache pour le lait et une chèvre complètent quasi systématiquement les familles. Et les échanges entre frères et sœurs, oncles et neveux sont courants. Ainsi, on mange bio, local et frais tous les jours. La culture de la terre est ancrée dans les familles. Ici, les adultes et les enfants connaissent les plantes, savent s’occuper de leurs bêtes et reconnaissent les changements de saisons. Le matin, ou le soir, chacun fait sa marche d’une heure pour être en bonne santé. Une vie considérée aujourd’hui, par bons nombres de nos concitoyens en France comme un idéal de décroissance, et de sens.